Une histoire d’expansion et d’évolution qui s’inscrit jusque dans les murs du département
Fondé en 1920 en tant que partie intégrante de la Faculté des sciences, le département de chimie a connu d’importantes transformations au fil des décennies. C’est au cours des années 1950 et 1960 qu’il s’émancipe de la faculté de médecine et des autres sciences pour acquérir sa pleine autonomie et poursuivre sa croissance en tant qu’identité distincte. Il s’est par la suite laïcisé, modernisé et féminisé.
André Beauchamp, professeur émérite aujourd’hui retraité, a été témoin de plusieurs des grandes phases de l’évolution du département, qu’il considère comme son « deuxième foyer ». Il est arrivé à l’UdeM en 1960 pour y entreprendre ses études. Après un stage postdoctoral de deux ans aux États-Unis, il y a été embauché comme professeur en 1968. L’homme, qui est de nature généreuse et qui a un merveilleux sens de l’humour, nous a fait le plaisir de nous raconter quelques souvenirs de son illustre parcours.
Au sujet de l’évolution des méthodes d’enseignement
« On est passé d’une époque où on entrait dans une salle de classe et les étudiants étaient assis avec une cravate », relate-t-il. « Il y avait quelques religieux et religieuses dans la salle de classe. Tout le monde était super silencieux. Le professeur n’avait qu’un seul outil pédagogique : c’était sa craie de tableau. Il n’y avait pas de notes polycopiées. Aujourd’hui, on a évolué à travers les transparents, à travers les PowerPoint, à travers toutes sortes de bidules où on peut voter “oui” ou “non” sur la question que le professeur pose. Ça fait toute une évolution sur le plan technologique et la façon d’enseigner. »
Au sujet de la forte présence religieuse au début de son parcours
« Quand j’étais au baccalauréat, dans ma classe, un des huit finissants – je pense que c’était un Père de Sainte-Croix – en tout cas, c’était un religieux. Il s’en allait enseigner en Haïti, si je me souviens bien », poursuit André Beauchamp. « En revenant de mon stage postdoctoral, quand j’ai commencé à enseigner, il y avait plusieurs religieuses. C’était l’époque où les cégeps ont été créés. Les personnes qui enseignaient avant, mais qui n’avaient pas vraiment les diplômes, devaient faire un complément de formation à l’université. Donc, il y a eu des cours du soir et des cours de jour avec plusieurs religieux. Les religieux étaient difficiles à reconnaître à cette époque-là parce qu’ils étaient déjà habillés à peu près comme tout le monde, tandis que les religieuses ont mis un peu plus de temps à se dégager du côté vestimentaire. Pendant sept ou huit ans, il y des religieuses qui sont venues suivre des cours de chimie. »
Les briques ont beaucoup de mémoire, je pense, et se sont retrouvées à différents endroits.
André Beauchamp, professeur émérite
Au sujet des nombreux réaménagements du pavillon Roger-Gaudry et de ses précieuses briques jaunes
La création des grands laboratoires et les besoins croissants des groupes de recherche ont nécessité bon nombre de déménagements et de reconfigurations de l’espace alloué aux activités du département de chimie. Mais il n’y a pas que les chercheur.ses qui ont eu à se déplacer. Aux dires d’André Beauchamp, les briques ont également beaucoup voyagé à l’intérieur du pavillon Roger-Gaudry :
« Dans ce bâtiment – comme j’ai été ici presque soixante ans – les murs ont changé de place au fur et à mesure que les groupes de recherche évoluaient et que les laboratoires se créaient. Mais comme ce sont des briques qui sont uniques à l’Université de Montréal, je crois, quand on défait un mur, on conserve les briques et on les transporte ailleurs pour faire le mur d’à côté. Il y donc a des briques qui se sont retrouvées probablement à quatre ou cinq endroits sur le mur qui est ici. À une certaine époque, il était tout à fait défendu de peindre ces murs-là. Dans mon bureau, le mur est peint, mais c’est assez récent et je pense que c’est à la suite d’une opération de délinquance qui a finalement été pardonnée. Si vous vous promenez dans l’université, vous allez voir des murs qui sont un peu comme une courtepointe, avec des briques qui sont de toutes sortes de couleurs parce que ce mur a probablement été fait avec des unités qui venaient de différents endroits. Les briques ont beaucoup de mémoire, je pense, et se sont retrouvées à différents endroits. »
J’étais surprise de voir un très grand nombre de femmes ici, dans les cours de 1er, 2e et 3e cycles.
Karen Waldron, professeure agrégée
Une présence féminine de plus en plus marquée au département
Karen Waldron, professeure agrégée, a été la première femme à être embauchée à titre de professeure au département de chimie. La chercheuse a eu l’occasion de fréquenter plusieurs des grandes universités canadiennes durant son parcours universitaire. Elle a fait ses études de baccalauréat et de maîtrise à Queen’s University et son doctorat à l’Université de l’Alberta, en plus d’enseigner à l’Université du Nouveau-Brunswick pendant un an, avant d’arriver à l’UdeM en 1994. Selon elle, le nombre de femmes en sciences et en génie est plus élevé au Québec que dans les autres provinces canadiennes :
« J’étais la première professeure féminine à venir ici, dit-elle. Mais par rapport aux étudiants, je pense que la proportion féminine des étudiants de cycles supérieurs et de premier cycle était plus haute qu’en Alberta et que lorsque j’ai fait mes études à Queen’s. Je ne sais pas si c’est encore le cas, mais c’était comme ça il y a vingt ans. J’étais surprise de voir un très grand nombre de femmes ici, dans les cours de 1er, 2e et 3e cycles. »